jeudi 3 août 2017

La petite oie sauvage Alice


samedi 24 juin 2006
CONTE
LA PETITE OIE SAUVAGE
Clarisse, depuis sa naissance n’avait pas de chance. Déjà avant de naître elle avait été mise de côté, presque tous les œufs étaient éclos sauf le sien. Aussi maman oie l’avait écartée pensant qu’elle était mort-né. Donc elle apparut avec retard.
La famille n’était pas très grande, Jargaud le père, Grisoie et trois autres poussins oies, déjà très hardis, dans leur duvet fin et sec. Ils vinrent, tour à tour, la picoter de leur bec, puisqu’elle ne leur ressemblait pas étant encore toute imprégnée du liquide d’ovoglobuline. Clarisse, se sentant un peu étrangère, poussait de petits cris " Ouah, ouah ", afin d’être reconnue, mais elle restait à l’écart parmi les autres œufs non éclos et les coquilles vides.
Dans la petite cabane, où logeait la famille, aucun confort juste un peu de paille dans le nid et de l’eau dans un récipient en métal. Les trois oisons précoces, cherchaient sans succès leur pitance fouillant le sol avec insistance. Heureusement, la fermière vint dans la journée, elle récupéra les nouveaux-nés et poussant Jargaud et Grisoie, elle les installa dans une grange sur de la paille fraîche et leur porta la pâtée dont Clarisse put enfin avoir quelques miettes disputées aux trois autres gloutons, beaucoup plus forts qu’elle.
L’oie, c’est bien connu, n’a pas un sentiment maternel très vif. Jargaud et Grisoie, ne tardèrent pas à partir en pleine campagne chercher une nourriture plus variée suivi des oisons les plus forts. Dans l’immense cour de la ferme, Clarisse se sentait perdue et se lamentait toute seule.
Un jour, alors qu’elle se plaignait doucement, se sentant abandonnée, elle vit apparaître tout près d’elle un grand oiseau blanc auréolé d’une lumière dorée. Comme elle reculait effrayée, l’oiseau lui dit dans un langage qu’elle comprenait bien :
- " Ne craint rien, petite oiselle, je compatis à ta tristesse et je viens pour t’aider à combattre ta solitude. Je suis l’enchanteur Elianus, je puis sur-le-champ satisfaire tous tes désirs, je connais tes malheurs et je serai près de toi chaque fois que tu feras appel à moi. Tu n’auras qu’à dire :
- Elianus Elianus viens à moi et j’apparaîtrais aussitôt.
- Oh ! merci enchanteur Elianus. Je suis si seule, j’aimerais beaucoup une compagnie.
- Cela Clarisse, je ne te l’accorderai pas, car il ne tient qu’à toi d’avoir de la compagnie. Regarde ce petit lapin blanc, pourquoi ne t’approcherais-tu pas de lui et plus loin ce canard tout duveteux il serait ravi de se promener avec toi.
- C’est vrai enchanteur, mais je suis si timide.
- Nous y voilà ! C’est donc ta timidité qu’il faut vaincre, je te laisse et lorsque tu l’auras vaincu appelle moi pour un autre souhait.
- Clarisse un peu déçue par cette réponse, réfléchit longtemps puis brusquement se hasarda à faire le premier pas. Miracle, le petit lapin, peut-être aussi craintif qu’elle fut tout réjoui de l’aubaine, aussi ils décidèrent ensemble d’aller trouver le canard et de faire un grand jeu tous trois. Quelle belle journée ce fut ! Clarisse ne s’ennuya plus.
Des jours et des jours passèrent sans histoire. Ils grandirent tous et peu à peu ils retournèrent à leur fratrie. Clarisse retrouvait parfois ses frères toujours aussi arrogants. Elle, la femelle se devait de les suivre ou qu’ils aillent. Elle n’avait pas son mot à dire. De plus les meilleurs morceaux étaient pour eux puisqu’ils étaient plus forts. Ils savaient chasser, poursuivre les sauterelles et même attraper de menus poissons dont ils se régalaient, riant de l’inaptitude de leur sœur. Cela la faisait souffrir, aussi un jour elle appela son ami l’enchanteur.
- " Elianus, Elianus, viens à mon secours. Un grand bruit d’ailes. Une lumière aveuglante et il était là.
- Chère Clarisse j’ai été heureux de tes progrès et toi même tu l’es également n’est-ce pas ?
- Certainement Monsieur l’enchanteur, j’ai de nombreux amis maintenant, mais je souffre de mon infériorité. Les jars, mes frères, règnent ici en maîtres, ils jacassent à grand bruit dans la cour et poursuivent menaçants toute personne ou animal qui passent. Comment sont-ils arrivés à un tel pouvoir et moi pas, alors que nous sommes du même âge ?
- C’est naturel Clarisse. D’abord parce que ce sont des mâles, leur corps, leur caractère, leurs aptitudes sont tout à fait différents des tiens puisque tu es une femelle. Différents mais pas supérieurs. Ce n’est qu’une apparence. As-tu pensé à la merveilleuse spécificité du corps féminin ? Certainement pas. Ce sont eux qui te jalouseront lorsqu’ils te verront promener fièrement ta progéniture.
- Vraiment ! Mais, est-ce que je pourrais alors les égaler ?
- Certainement, le fait de diriger ta couvée te donnera l’aplomb nécessaire pour la capture de toutes ces petites proies. Courage Clarisse le temps des accouplements arrive. Prends patience et tu seras enfin heureuse. "
Les paroles de l’enchanteur se vérifièrent quelques mois plus tard et Clarisse se vit à la tête de cinq petits oisons. Elle en fut extrêmement fière jusqu’au jour où ses petits prirent à leur tour le large. Se sentant désemparée, elle appela une fois encore Elianus l’enchanteur.
Un grand bruissement d’ailes et il apparut dans une grande clarté.
- " Que veux-tu encore ! Ta condition ne te suffit-elle pas ? dit-il un peu agaçé.
- Oh oui, Monsieur l’enchanteur, mais pourquoi ne puis-je être comme la fermière où sa fille, une personne ? J’ai remarqué combien elles font de choses admirables en plus de l’entretien de la ferme, elles ont des mains, des jambes, elles sont rapides, actives continuellement. Elles changent de vêtements ce qui leur donne de la couleur. Comment peut-on arriver à cet état ?
- Dans un grand éclat de rire, Elianus répondit :
- Ma chère Clarisse, je pourrais accéder à ce que tu me demandes, mais je dois te prévenir que ce que tu vois n’est que l’extérieur des choses. Tu ne te doutes pas des efforts que font également les humains pour apprendre, persévérer, lutter, afin de parvenir à ce bonheur que tu leur envies. La volonté, tu l’as expérimenté toi-même, t’as donné des résultats. Tu as d’abord dominé ta timidité, tu es devenue plus sociable, tu as eu une magnifique nichée, tu as su les élever. Maintenant tu jalouses les humains, mais sais-tu que tu as un grand avantage sur eux ? Oui, vraiment. Toi tu trouves abri, soins et nourriture sans t’en inquiéter. Ce n’est pas leur cas. Pour eux se sont des soucis, du travail, des responsabilités auprès des leurs et de la société qu’ils ont constituée, s’ils veulent survivre et progresser. Te sens-tu assez forte pour faire de tels efforts ?
- Je ne sais pas, cependant, je crois que si j’étais une personne je trouverais en moi-même des forces pour parvenir comme les autres à acquérir le bonheur. Je veux bien essayer.
L’enchanteur s’inclina et alors apparut dans une auréole une magnifique femme, résolue à progresser, pour parvenir à réaliser ses rêves.

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Alice raconte son enfance